Invité à se prononcer sur la proposition de loi portant révision de la Constitution déposée à l’Assemblée nationale vendredi dernier, Daniel Edah, président du mouvement « Nous le ferons » et membre du parti Les Démocrates, est revenu, sur l’émission Au cœur de l’info de BBC Afrique, sur les points saillants de sa lettre ouverte adressée au président Patrice Talon.
Son intervention intervient au lendemain de la validation, par la Commission des lois, de cette proposition de révision qu’il juge profondément inopportune et dangereuse pour la démocratie béninoise.
Une initiative jugée sans légitimité
Pour Daniel Edah, les parlementaires actuels n’ont pas la légitimité morale pour s’engager dans une telle réforme. Il estime que cette proposition, introduite à la fin de la législature, ne devrait pas être portée par une Assemblée en fin de mandat.
« La majorité présidentielle n’a pas reçu mandat du peuple pour toucher à la Constitution », a-t-il insisté.
À ses yeux, cette initiative dépasse le cadre d’un simple débat institutionnel : elle serait dictée par des logiques politiciennes et opportunistes, dans un contexte où les démissions récentes au sein de l’opposition ont fragilisé le principal parti adverse, supprimant de fait la minorité de blocage qui servait jusque-là de garde-fou.
Un appel direct à Patrice Talon : pourquoi ?
Interrogé sur les raisons de sa lettre ouverte adressée directement au chef de l’État alors que la proposition émane de députés, Daniel Edah justifie son choix :
« Aucun député de la majorité présidentielle ne saurait prendre l’initiative d’une révision constitutionnelle sans l’aval du président Talon », affirme-t-il.
Pour lui, le geste est autant symbolique que stratégique : « Nous n’avons pas le temps de faire la politique politicienne. C’est pourquoi nous avons décidé de nous adresser directement à lui », a-t-il expliqué sur BBC Afrique.
Le problème du timing : “Qu’est-ce qui presse ?”
L’une des principales critiques du leader du mouvement Nous le ferons concerne le moment choisi pour introduire cette révision.
« Pourquoi lancer un tel projet à quelques mois de la présidentielle ? Pourquoi ne pas attendre la prochaine législature ou un nouveau président pour un débat plus apaisé ? », s’interroge-t-il.
Selon lui, le calendrier trahit une volonté de verrouiller l’avenir politique. « Le verrou de la minorité de blocage ayant sauté, on introduit un texte dans la foulée… cela cache beaucoup de choses », a-t-il déploré.
Un appel au référendum : la voix du peuple
S’il reconnaît que certaines révisions peuvent être légitimes, Daniel Edah plaide pour que le peuple béninois soit consulté :
« Si cette révision vous paraît indispensable, alors permettez au peuple de se prononcer par référendum », a-t-il proposé.
À ses yeux, cette démarche serait un acte de respect démocratique et un geste historique du président Talon envers les citoyens.
Mise en garde et appel à la sagesse
Dans la dernière partie de son intervention, Daniel Edah a mis en garde contre les risques d’instabilité institutionnelle et politique.
Il évoque un possible désintérêt des investisseurs étrangers face à une réforme précipitée, mais aussi la menace d’un système politique monolithique, rappelant les dérives autoritaires d’antan.
L’opposant conclut sur un avertissement solennel : « Aucune violence d’État ne peut arrêter un peuple exaspéré, acculé et déterminé. »
Il en appelle ainsi au patriotisme et à la sagesse du président Patrice Talon, l’exhortant à éviter toute révision constitutionnelle non consensuelle et à privilégier un dialogue national ouvert et apaisé.





