Un tribunal provincial de Bioko, en Guinée équatoriale, a condamné ce mercredi Baltasar Ebang Engonga – surnommé « Bello » – à huit ans de prison ferme. Il devra également s’acquitter d’une amende d’environ 125,4 millions de francs CFA (soit près de 190 000 €) .
Les faits reprochés
Engonga, ancien directeur de l’Agence nationale d’investigation financière (ANIF), était jugé pour détournement de fonds publics. Selon le tribunal, les montants détournés, allant de 5 à 125 millions de francs CFA (entre 7 600 et 190 000 €), ont été employés à des fins personnelles sous couvert de frais de missions ou voyages déjà financés par l’État . La direction générale de la presse de la Cour suprême, Hilario Mitogo, a confirmé ces éléments aux journalistes via WhatsApp .
Le contexte du scandale
La condamnation survient dans le prolongement d’un scandale ayant éclaboussé Engonga en novembre 2024, lorsque des sextapes, dont certaines auraient été tournées dans son bureau au ministère des Finances, ont été diffusées massivement sur les réseaux sociaux, provoquant un véritable émoi national et international .
Ces vidéos, impliquant plusieurs femmes – parfois apparentées à des hauts responsables – ont suscité un tel brouhaha que les autorités ont momentanément limité l’accès internet dans plusieurs régions du pays pour freiner les téléchargements massifs. Le phénomène a rapidement débordé les frontières, donnant lieu à des mèmes, danses, chansons et même la commercialisation satirique d’un supposé aphrodisiaque baptisé « Balthazariem » .
Une peine partielle face à une sentence plus lourde initialement demandée
Avant le verdict, le parquet avait requis une peine bien plus sévère. La demande initiale visait une peine cumulée de 18 ans de prison :
- 8 ans pour détournement,
- 4 ans et 5 mois pour enrichissement illicite,
- 6 ans et 1 jour pour abus de pouvoir,
assortis d’une lourde amende (environ 910 millions de francs CFA, soit près de 1,5 million USD) et d’une interdiction de toute fonction publique .
Or, le tribunal a finalement retenu une version plus limitée de l’infraction : détournement de frais de mission seulement, avec une peine de 8 ans assortie d’une amende significativement moindre . Pour rappel, Engonga est membre d’une des familles les plus puissantes du pays – il est le fils de Baltasar Engonga Edjo’o, actuel président de la Commission de la CEMAC .
Réactions et portée de l’affaire
Cette condamnation intervient au milieu d’un climat déjà lourd de reproches contre le régime, souvent critiqué pour sa gouvernance opaque et son manque de transparence. En 2024, le scandale des vidéos avait conduit à l’éviction d’Engonga de ses fonctions par un décret présidentiel, puis à son incarcération à la tristement célèbre prison de Black Beach .
Certains observateurs estiment que cette affaire traduit les tensions internes à la famille présidentielle et met en lumière les dynamiques de pouvoir entourant la succession au sommet de l’État. Le procès a également rattissé d’autres hauts fonctionnaires soupçonnés d’avoir participé au réseau de corruption systémique .
La condamnation à huit ans de prison et une amende notable marque un tournant dans une affaire mêlant détournement de fonds publics, scandale sexuel et lutte politique interne. Elle pourrait être interprétée comme un signal adressé à d’autres membres de l’élite gouvernementale, tout en soulevant des questions sur l’indépendance de la justice et la transparence dans un régime longtemps critiqué pour son autoritarisme.





