A quelques mois d’une présidentielle très attendue au Bénin, le principal parti d’opposition, Les Démocrates, est engagé dans une bataille à la fois politique et judiciaire dont l’issue pourrait redessiner le paysage électoral du pays. Et à 24 heures du verdict décisif de la Cour constitutionnelle, l’inquiétude est à son comble. Convoqués par la police judiciaire, confrontés à un contentieux électoral complexe, les leaders du parti se retrouvent dans un véritable guêpier, et Dieu seul sait s’ils en sortiront indemnes.
Un duel juridique aux enjeux vitaux
Le nœud de l’affaire ? Une fiche de parrainage attribuée par le député Michel Sodjinou, que celui-ci conteste avoir donné librement. Cette signature est pourtant cruciale pour Les Démocrates, qui doivent rassembler 28 parrainages pour présenter leur duo de candidats à la présidentielle de 2026. Un seul manquement, et leur candidature s’effondre.
Le 13 octobre 2025, le tribunal de première instance de Cotonou a ordonné au parti de restituer cette fiche. Face à ce revers, le parti a répliqué par un recours devant la Cour constitutionnelle, estimant que seule cette institution est habilitée à trancher un tel litige. L’audience, initialement prévue le 20 octobre, a été reportée au jeudi 23 octobre — un délai accordé pour que le parti complète son dossier. C’est donc demain que tout se joue.
Des convocations au goût amer
Mais l’ambiance s’est encore tendue cette semaine avec une série de convocations inattendues. Boni Yayi, président du parti, ainsi que les candidats Me Renaud Agbodjo et Jude Lodjou, ont été convoqués à la Police judiciaire. Le dossier judiciaire référencé 918/DPJ/DGPR/SA, dont le contenu reste flou, suscite une vague de réactions. Pour certains observateurs, il s’agirait d’un simple acte de procédure. Pour d’autres, une manœuvre politique à peine voilée, destinée à faire pression sur le parti la veille d’un rendez-vous décisif.
Dans l’opinion publique, la question se pose : est-ce encore de la justice, ou déjà de l’intimidation politique ? Le contexte national, où les rapports entre pouvoir et opposition restent crispés, n’aide pas à dissiper les soupçons.
Un peuple suspendu à la décision de la Cour
Au-delà des procédures, c’est toute une partie du peuple béninois qui retient son souffle. Dans les quartiers, sur les réseaux sociaux, dans les débats citoyens, une attente se dessine : que Les Démocrates puissent participer à l’élection. Non pas par préférence politique unanime, mais par souci d’équilibre démocratique et surtout, de préservation de la paix.
L’idée que l’unique grand parti d’opposition soit écarté du processus électoral suscite des inquiétudes profondes. Beaucoup craignent que l’exclusion d’un acteur aussi majeur crée un vide, une tension sociale ou pire, une crise de légitimité du scrutin à venir.
Tous les scénarios sont encore sur la table
Ce jeudi 23 octobre, la Cour constitutionnelle pourrait :
Valider le recours, confirmant la validité de la fiche de parrainage et maintenant Les Démocrates dans la course.
Rejeter le recours, ce qui reviendrait à les exclure, sauf nouveau miracle juridique.
Ou encore rendre une décision mitigée, ouvrant la voie à des ajustements ou à une médiation.
Quel que soit le scénario, l’impact sera colossal. Et les jours suivants risquent d’être scrutés autant à Cotonou qu’à l’étranger.
Un test grandeur nature pour la démocratie béninoise
Ce bras de fer entre un parti d’opposition et les institutions de la République met à nu les fragilités de notre démocratie. Il soulève des questions majeures sur la neutralité de la justice, la transparence du processus électoral et la place de l’opposition dans la vie politique.
À ce stade, Les Démocrates semblent marcher sur un fil. Leur avenir immédiat est suspendu à une décision judiciaire. Mais l’enjeu est plus vaste : c’est la confiance du peuple dans l’équité du système politique qui est en jeu.
Le Bénin est souvent cité comme un exemple de stabilité démocratique en Afrique de l’Ouest. Le pays ne peut se permettre une présidentielle sans opposition réelle. L’histoire montre que les élections à candidat unique, même sous des formes légales, n’apportent ni légitimité, ni paix durable.
Conclusion : un appel silencieux du peuple
Dans ce contexte, le peuple béninois espère, silencieusement mais intensément, que la justice permettra au parti Les Démocrates de participer au scrutin de 2026. Non par faveur, mais par droit. Parce que la démocratie béninoise a besoin d’un véritable choix. Parce que la paix a besoin d’un équilibre politique. Et parce que le Bénin ne mérite pas que la prochaine présidentielle soit entachée d’exclusions évitables.
À la veille du verdict, une seule chose est sûre : le sort des Démocrates ne concerne pas seulement un parti, mais toute une nation.




